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Après deux décennies de travail ininterrompu, l’un des leaders mondiaux de la haute cuisine ferme ses portes. C’est ce qu’a annoncé son créateur, le chef René Redzepi, qui a assuré dans une interview au New York Times que l’établissement de Copenhague fermera ses portes à la fin de l’année 2024.

Le Noma a remporté de nombreuses récompenses, notamment quatre années quasi consécutives en tant que meilleur restaurant du monde selon le magazine Restaurant et, en 2021, il a remporté la première place des World’s 50 Best Restaurants Awards.

Depuis la pandémie, le restaurant traverse une grave crise interne, aggravée par d’autres problèmes, qui lui ont fait perdre sa rentabilité. Pour toutes ces raisons, et à moins d’un apport financier significatif de la part d’un investisseur privé, la seule façon pour Redzepi de maintenir l’entreprise est de changer la feuille de route et d’en faire un laboratoire alimentaire.

Ce faisant, il développera de nouveaux plats et produits pour leur site de commerce électronique d’aliments fermentés, Noma Projects. Ce dernier a fait ses débuts en 2022 avec une sauce à base de champignons fermentés puis fumés.

Il sera rebaptisé « Noma 3.0 » et se consacrera à l’innovation alimentaire et au développement de nouvelles saveurs. Ce processus de transformation prendra deux à quatre ans, mais il devrait représenter l’avenir de l’entreprise.

Les raisons de la fermeture

Malgré sa carte innovante, maîtrisant les techniques de décapage et les plats scandinaves comme la fleur d’églantier farcie, et son décor, le restaurant n’a pas réussi à survivre. Il possède trois étoiles Michelin et fait partie du groupe de restaurants influents « The Best of the Best », mais la situation économique le pousse à fermer.

Son menu dégustation à 470 euros (boissons non comprises) est de moins en moins demandé en raison de la crise économique et énergétique naissante qui touche toute l’Europe suite à la guerre en Ukraine. De plus, depuis octobre 2022, il doit débourser 50 000 euros supplémentaires par mois pour payer ses stagiaires, suite aux critiques faites à ce type de restaurant d’avoir recours à des stagiaires non rémunérés. Les dettes s’accumulent. En 2021, il a perdu 230 000 euros et a reçu 1,5 million d’euros de l’administration publique danoise.

À cela s’ajoutent les mauvais traitements et le niveau élevé de pression et de stress auxquels Redzepi a soumis son personnel. Le chef est allé jusqu’à déclarer que s’il payait équitablement ses cuisiniers, l’entreprise ne serait pas rentable. Les journées de seize heures et la présence de 20 à 30 stagiaires sont devenues la norme. Il a même déclaré publiquement qu’il avait commencé à pratiquer la méditation pour changer sa philosophie d’entreprise.

Une deuxième crise pour le restaurant

C’est la deuxième grande crise que traverse le Noma, qui avait dû fermer ses portes en 2016 pour réapparaître en 2018 dans un lieu rénové, près de la capitale du Danemark, avec un jardin urbain et une large gamme de menus.

De nouveau projet

Mais il n’y a pas que des mauvaises nouvelles, et il prévoit d’ouvrir un restaurant pop-up (pour une période déterminée) et le premier restaurant éphémère Noma à Kyoto (Japon). Il se concentrera sur la consolidation de son travail en tant que chef créatif, plutôt qu’en tant que chef cuisinier.

M. Redzepi n’exclut pas d’ouvrir des restaurants ponctuels dans différents endroits, comme Copenhague, mais une fois par an ou tous les deux ans.

Un bon moment pour la gastronomie danoise

Par ailleurs, et malgré cette nouvelle, le restaurant Geranium de Copenhague, dirigé par le chef Rasmus Kofoed, a remporté le prix du « meilleur restaurant du monde » décerné par le magazine Restaurant. Ses noix de Jérusalem aux feuilles d’artichaut ou ses cailles aux graines de thym et aux baies sont quelques-unes de ses cartes de visite.

La rentabilité de la haute cuisine ?

En ces temps où l’inflation et les impôts grimpent en flèche, les familles sont contraintes de se serrer la ceinture, et lorsqu’il s’agit de réduire les dépenses inutiles, les visites dans ce type de restaurants sont les premières à être supprimées.

Plusieurs chefs français estiment que la haute cuisine n’est pas rentable et qu’elle ne peut être soutenue que par d’autres activités. Beaucoup affirment que la rentabilité n’est possible que grâce à un équilibre entre le dévouement et les avantages économiques. Au final, l’investissement de 80 % du temps et de l’argent ne rapporte que 10 % de bénéfices.

Pour d’autres, c’est plutôt la culture de la société qui est en cause, car le succès est finalement déterminé par les sommes investies dans la publicité, même si les restaurants ne génèrent que des pertes. De plus, les consommateurs regardent aujourd’hui davantage le prix et recherchent des endroits où ils peuvent manger plus et pour un bon prix, plutôt que l’excellence et la qualité.

Si le secteur de la gastronomie en France devait atteindre les prix d’autres villes comme Tokyo, New York, Londres ou Madrid, il serait condamné à la fermeture immédiate.

En fin de compte, ceux qui maintiennent ce type de restaurant ne peuvent que chercher des locaux plus petits, avec des structures et des coûts réduits. Une autre alternative consiste à rechercher des activités secondaires qui apportent également une rentabilité au pionnier, telles que les services de conseil, les écoles ou la restauration, c’est-à-dire des marques secondaires qui ajoutent de la valeur et maintiennent le point de référence de l’entreprise.

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